Congo Brazzaville : Denis Sassou-Nguesso a-t-il si peur de Marcel Guitoukoulou ?
Pour l’élection présidentielle du Congo-Brazzaville prévue en 2009, jusqu’il y a peu encore, la seule inconnue qui existait, la seule incertitude crédible était : Qui servira de faire-valoir au quasi vainqueur Denis Sassou-Nguesso ? Entre l’exil interminable des uns et l’allégeance à l’usure des autres, le président congolais en place semblait sur une voie royale pour sa réélection. Cela jusqu’à ce qu’on peut considérer comme le premier fait notoire de la précampagne électorale : l’expulsion du Bénin de Marcel Guitoukoulou candidat potentiel accusé par le gouvernement béninois de « déstabiliser le gouvernement congolais ».Les péripéties de cette expulsion à motivation politique est relatée par le quotidien béninois Le Matinal : « C’est sur le chemin d’un rendez-vous que le docteur Marcel Guitoukoulou a été rattrapé par deux personnes à bord d’une voiture de marque Toyota Carina, couleur marron. À bord, il y avait un commissaire de police de deuxième classe accompagné de son adjoint. Les deux étaient en compagnie d’un membre de l’équipe de l’opposant congolais. Il lui sera intimé l’ordre de monter à bord de leur véhicule pour se rendre à son hôtel de résidence situé dans le quartier Guinkomey, 5ème arrondissement de Cotonou. Ensuite, aux environs de 18 heures dans l’après-midi du dimanche, les locaux des services de l’immigration accueillent l’opposant et les autres membres de son staff qui l’accompagnait. ’’Vous êtes un opposant connu et le Bénin ne peut servir de base à la déstabilisation du régime du président Denis Sassou Nguesso. Remettez-moi vos passeports et apprêtez vos affaires. Vous serez reconduit’’ Ainsi en ont décidé les autorités compétentes du Bénin. Durant un interrogatoire de plusieurs heures, les personnes interpellées ne réussiront pas à faire changer d’avis à des hommes aux ordres. Marcel Guitoukoulou et ses compagnons seront expulsés du Bénin par les autorités policières dans la nuit du dimanche 19 au lundi 20 octobre 2008. Ils sont aussitôt embarqués manu militari pour retourner à Paris ».
Retour sur ce voyage qui fera date dans la course au pouvoir à Brazzaville : arrivé de France pour s’adresser à ses compatriotes expatriés au Bénin où un comité de soutien à sa candidature a été constitué, Marcel Guitoukoulou a reçu un accueil « présidentiel » dès l’aéroport de Cotonou : une foule en liesse estimée à plus de 500 Congolais, vêtus de t-shirt à l’effigie de leur champion, battant le tam-tam et chantant pour le changement au Congo. Édifiant car cela se passe à l’étranger et parce qu’il s’agit d’un probable candidat qui n’a jamais été aux affaires et qu’on ne peut soupçonner d’avoir amassé un trésor de guerre à l’odeur du pétrole. Le comité de soutien du Bénin s’est constitué spontanément en découvrant dans les médias notamment le candidat, ses actions humanitaires et ses initiatives pour la paix dans le pool et pour la réconciliation nationale. Une rareté aussi, ledit comité de soutien finance intégralement ses activités. Suffisant pour faire vaciller le régime de Sassou Nguesso et affoler à ce point le gouvernement de Yayi Boni ?
Le Bénin a-t-il agi sur commande ou son président s’est-il voulu simplement héritier des méthodes de la protection mutuelle pratiquée par les dictatures africaines dans les années 70 et 80 ? Le journal béninois Le Matinal relève certaines accointances peut-être pas anodines : « Il y a quelques mois le chef de l’État béninois Yayi Boni et son épouse Chantal ont assisté en personne au mariage de la fille de Denis Sassou Nguesso avec un béninois célébré à Cotonou, il faut également montrer que les liens d’amitié renforcés entre les deux familles présidentielles ne doivent pas mettre en péril ce que le Bénin a de plus cher ». Comme du temps des royautés, Sassou Nguesso serait-il en train de quadriller l’Afrique en « plaçant » ses filles ? Le doyen des présidents africains Omar Bongo est, en effet, son gendre, tandis que le chef de l’État d’un immense pays d’Afrique centrale a failli épouser une autre fille du président congolais.
Nous n’entendons pas évidemment accréditer la thèse selon laquelle toutes ces choses sont imbriquées effectivement, quoi que. Il reste que cette expulsion, concertée ou non, de Marcel Guitoukoulou est un indicateur de l’envergure réelle de ce dernier. Représenterait-il la meilleure chance de l’opposition pour la présidentielle de 2009 ? Les autorités béninoises semblent effectivement le craindre. Grâce à leur propre analyse ou sur indication de Denis Sassou Nguesso ?
Lu pour vous,
Rangot Tsasa
Congo-Election-Présidentielle : Le 1er tour de l’élection présidentielle fixé au 12 juillet 2009 au Congo
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