Wednesday 6 May 2009

Commprenne qui pourra: Kamerhe? l'homme de la situation.

L’éviction de Kamerhe : qui en sort perdant ? Par Mwamba Tshibangu
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À quelque chose malheur est bon, dit-on. Le conflit de légitimité constitutionnelle entre Joseph « Kabila » et Kamerhe qui a connu le dénouement que l’on sait, a été une bonne chose pour les intérêts de la République. D’aucuns y ont vu un début de la dictature quand, il faut le souligner, la dictature a toujours été le lot du régime de « Kabila-fils ». D'autres y ont vu l’ancrage de Kamerhe aux principes démocratiques quand, en vérité, Kamerhe a été le prototype de celui qui jouait au miroir déformant pour faire passer, fondamentalement, ce qui est non démocratique comme étant démocratique.

La démocratie ne se décrète pas sur la forme et moins encore sur des mots bien distillés pour le besoin de la cause. Elle ne se décrète pas non plus sur des actes isolés qui puent, à bien s’y prendre, l’hypocrisie et cachent par-dessus tout le dysfonctionnement du système dictatorial qui se poursuit depuis l’avènement de l’AFDL jusqu’à ce jour. C’est dans la constance des actes et la transparence de toutes les procédures que l’on peut établir si une institution ou tout le système observent les règles démocratiques.

Artisan(s) de la démocratie ou de la dictature ?

Vital Kamerhe, avec son ascendance politique, a beaucoup joué le rôle du paratonnerre couvrant les errements et les faiblesses démontrés à plusieurs reprises par le patron de son écurie politique dans la gouvernance du pays. Il l’a inlassablement soutenu et propulsé lors des élections garantissant ainsi son élection. Il a été le pivot de sa politique dans son parti, le PPRD et au sein du parlement. Cohérent dans sa fidélité, en dépit du tâtonnement de leur politique du chaos qui est décidément mal orientée, Kamerhe n’a pas lâché son chef. Il l’a manifestement démontré dans ses deux derniers discours prononcés devant l’assemblée au moment où son sort était pratiquement scellé. Kamerhe, à côté de quelques autres personnages de l’AMP, est l’homme clé du régime dictatorial de Joseph Kabila. Kamerhe a une vision sublime de son patron qu’il continue à idolâtrer, à adouber en dépit tout. Il l’a, jusqu’au bout et sans remords, encensé. Il l’a, en bon flatteur, caressé dans le sens du poil alors qu’il connaît réellement sa capacité et plus que tout, ses lacunes. Ainsi, s’est-il permis de soutenir, pince sans rire, que son boss de président, « élu démocratiquement » est l’artisan de la démocratie en RDC. Sur ce point, le rapprochement pourrait être vite fait entre les propos maladroits d’un Louis Michel qui qualifiait l’autre comme étant l’espoir du Congo.

Le rôle de Kamerhe dans l’effondrement de la RDC que nous observons au quotidien doit être jugé sévèrement. Comme par ailleurs, l’implication des autres politiciens qui se contentent de leurs prébendes au détriment de la nation qui est en train de s’enfoncer chaque jour davantage. Le conflit entre Kamerhe et sa famille politique qui a abouti à sa défénestration est riche d’enseignements. De prime abord, on a vu comment les jeux politiciens ont primé sur les intérêts suprêmes de la nation. C’est absurde qu’on ait culpabilisé le président de l’assemblée nationale pour avoir exprimé ouvertement un état de lieu lors de l’opération dénommée « Umoja Wetu ». Il n’était pas du tout informé de la décision concernant le déploiement des troupes rwandaises sur le territoire congolais pour traquer les FNLR. En disant cette vérité, par maladresse que par réelle opposition, Kamerhe s’est rendu coupable de trahison non envers la nation mais envers Kabila. La culpabilité en droit constitutionnelle a été inversée. Kabila s’en est sorti en héros. Au lieu d’être indexé de haute trahison à la nation comme il se devait normalement, on souligne et Kamerhe en premier, qu’il est au-dessus de la mêlée. Il peut prendre n’importe quelle décision sans devoir en répondre devant aucune institution.

Une logique étriquée

Ce fait gravissime qui met en évidence le statut que l’on continue à accorder au président de la république en dehors des articles de la constitution révèle, en réalité, un état d’esprit qu’il faut dénoncer vigoureusement. C’est le cas de faire remarquer ici la logique générale des Congolais. Ces derniers semblent se contenter plus facilement de retombées de certaines machinations, des résultats illusoires ou efficaces qu’on leur présente, sans rechercher en profondeur les causes qui en sous-tendent moins encore, sans les analyser objectivement pour comprendre si le tout s’est fait suivant l’observance des règles. Que cela soit en matière de sécurité ou aux actes qui relèvent du « secret défense », il existe tout de même des règles tacites à observer…

Tenez. Dans la tourmente de l’est subsiste à dessein une politique teintée de manipulations grossières. Celle-ci affecte particulièrement la population civile et sans défense. Atrocement touchée et affaiblie dans leur vécu quotidien par des tribulations à répétition, par des actes abominables qui les rendent victime sacrificielle de leurs agresseurs, elle devient la cible facile des manœuvres consistant à souffler le chaud et le froid qui se trament à leur insu. Par solidarité nationale, le reste de la population congolaise s’aligne, s’apitoie à leur sort. Dès que leurs agresseurs se ravisent tactiquement et adoptent une position de compromis privilégiant la paix - même s’ils revêtiront la veste de bourreaux et perpétreront atrocement encore les mêmes actes abominables – et bien, c’est tout le monde qui les applaudit. Etant, par la faute du gouvernement, dans une position de faiblesse chronique, il suffit qu’on évoque malignement la paix pour qu’on oublie vite la responsabilité pénale et civile des agresseurs consacrant ainsi l’impunité et la violence programmée cycliquement. Voilà à quelle logique est réduite la majorité du peuple congolais qui privilégie le momentum aux principes sacro-saints de la justice et des peines conséquentes à infliger aux criminels de guerre et aux autres bandits qui violent systématiques les règles du droit commun.

Le prix à payer

Kamerhe, maître d’œuvre du kabilisme joséphiste comme disent certains, a été lâché par les siens pour préserver le « raïs ». Cependant, la logique voudrait que les membres de l’alliance pour la majorité présidentielle ne s’arrêtent pas en si bon chemin. Qu’ils poursuivent leur politique de désaveu à l’égard du président du Sénat qui avait aussi signifié n’être au courant de rien. Qu’ils exigent aussi la démission du général Etumba qui avait courageusement répété les mêmes propos. Ainsi, croirons-nous en leur bonne foi et non à un de ces nombreux schémas de distraction parsemés sur le chemin du complot de la désintégration de la RDC. Alors que le focus était tourné vers la sortie forcée de Kamerhe, de l’autre côté, sans tambour battant, le gouvernement et le CNDP signaient le 22 mars 09 l’accord dit de Ihussi. Celui-ci est révélateur du niveau d’avancement de ce projet qui procède par étape bien calculée. Le découpage du Nord Kivu n’est qu’une question de temps. La politique a ses revers imprévus et est l’objet de faux calculs qui en font le lot. L’éviction de Kamerhe, l’un des principaux pivots de la politique du mensonge et d'affabulation de « Joseph Kabila » face au peuple congolais risque de mal tournée pour les intérêts qui semblaient jusque là les lier. En cherchant sa tête à tout prix, la clique des apparatchiks qui a constitué jusqu’ici sa ceinture de sécurité politique a certainement perdu un élément de poids. Un autre (zélé ?) prendra la relève. C’est assuré. Le clan politique de l’AMP est fractionné. Au fond, qui en sort perdant ?

Lu pour vous,

Rangot Tsasa

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