Tuesday 9 June 2009

L’Afrique centrale vers un changement générationnel

L’Afrique centrale est l’une des sous-régionales d’Afrique qui n’a jamais connu un véritable élan démocratique depuis son ascension à l’indépendance et minée par une lutte régionale de leadership qui a conduit les Etats membres vers une personnalisation en leur chefs d’Etat. Nonobstant le vent de la démocratie qui avait soufflé dans les années 90’ , les Chefs d’Etat de la sous-région ont résisté aux revendications des peuples pour un changement radical dans la gestion des affaires, caractérisées par le clientélisme, la corruption, le culte de personnalité, le monopartisme, la familiarisation des finances publics et surtout la clochardisation des peuples. Ces derniers ont été victimes du pouvoir absolu imposé d’en haut.

Nous assistons, depuis un mois, à une scène purement africaine où la maladie et par conséquent le décès d’un Chef d’Etat sont devenus un secret d’Etat pendant que ce dernier a été juste hier un des hommes les plus influents du continent. Comme si la honte ne vient pas seule, le Premier Ministre gabonais s’est illustré en cabale médiatique en s’empressant de démentir l’information selon laquelle le Président gabonais aurait rendu l’âme, allant jusqu’à menacer la presse française pour avoir diffusé une nouvelle sans fondement. Le peuple africain en général et gabonais en particulier avaient droit de savoir ce qui se passait autour de Omar Bongo, paix en son âme, sur son état de santé après quasi un demi siècle de règne sans partage. Il est vraiment inadmissible que l’entourage du Chef d Etat ait entretenu un flou artistique sur son état de santé et sa mort pendant que ses années au pouvoir ont été le fruit d’une médiatisation au zénith. Un simple déplacement de ce dernier en Europe se suivait d’une série de reportage. Mais son hospitalisation en Espagne a été présentée comme un repos personnel après le décès prématuré de son épouse. C’est seulement lorsque les média étrangers se sont mêlés de l’histoire, la présidence de la république s’est précipitée pour confirmer son hospitalisation. Ce qui est sûr c’est que l’Afrique centrale tend vers une métamorphose générationnelle de ses dirigeants après avoir été longtemps le berceau des dictatures. De Mobutu à Bongo en passant par Obiang Nguema et Sassou Nguesso pour finir avec Paul Biya, Edourdo Do Santos et Idriss Deby. C’est l’unique partie du continent où même l’intégration économique peine à décoller par rapport aux grands progrès qui se réalisent en Afrique de l’ouest ou en Afrique australe où l’intégration économique et la libre circulation des biens et personnes, surtout en Afrique occidentale, est devenue une réalité.

En Afrique centrale ces vieux dinosaures, presque issus de l’indépendance, ont prouvé à la face du monde leur incapacité dans la gestion de la chose publique. Des exceptions près avec l’Angola et la Guinée Equatoriale sur le plan économique. L’élan démocratique et économique dépend, en grande partie, de la disparition sur la scène politique de ces hommes. Mais l’acte posé par le Premier Ministre gabonais montre l’irresponsabilité des dirigeants africains. Selon ma propre pensée, les autorités gabonaises se sont réveillées avec la fuite de l’information sur la mort du Chef. Pour ne pas donner l’exclusivité de l’information aux média français, elles ont tenté de démentir ce matin pour la confirmer après. Ce qui est encore grave, c’est qu’après le décès du Chef elles (autorités) n’ont pas entamé la procédure pour sa succession selon les us et coutumes de la constitution gabonaise. Le flou entretenu démontre une volonté délibérée de s’asseoir sur la constitution et imposer au peuple gabonais un homme en dehors de la légalité. On risque de se trouver dans le schémas de la monarchie républicaine :on assiste aux vacances de pouvoir depuis le décès du doyen des Chefs d’Etat africains.

Cette monarchie républicaine est en train naître au Gabon. Le fait d’avoir déclenché le couvre feu sur tout le territoire gabonais sans penser à l’ordre constitutionnel dévoile les ambitions familiales de la famille Bongo. Or c’est le personnage constitutionnel qui devrait préparer les obsèques de l’ex président gabonais et organiser les élections selon le chronogramme de la loi des lois. La disparition de Bongo met fin au pouvoir indéterminé au Gabon et ouvre la porte vers le renouvellement de la classe politique gabonaise en particulier et celle de l’Afrique centrale en général là où le germe de la dictature opprime l’émergence d’une classe politique ambitieuse et consciente des défis à relever pour bâtir une sous-région prospère, loin des clivages de méfiance et de rivalité de leurs Chefs. Ce n’est pas non plus normal qu’un Chef d’Etat arrivé au pouvoir quand Obama, le président américain, avait à peine 7 ans. Combien de présidents américains se sont succédés ? Combien de présidents français l’ont accueilli en France et aujourd’hui ils reposent en paix ? N’y a-t-il jamais eu d’autres gabonais capables de prendre les reines du pouvoir ?

J’ose croire que la disparition, pas nécessairement physique, sur la scène politique de ces hommes dans la sous-région, apporterait un nouveau souffle dans l’intégration politique, économique, sociale et professionnelle des peuples. Elle va, sans doute, réinstaurer la confiance au sein de la CEAC et de la CEMAC. Ces dernières institutions ont été victimes d’antagonisme à outrance de ces leaders. Le Cameroun voulait être le moteur économique. La découverte du pétrole en Guinée Equatoriale a relancé les ambitions de Obiang Nguema dans les organes décisionnels de la Cemac. Le Gabon a toujours reçu un soutien sans faille de la France et Bongo était considéré le cerveau de la francafrique. Sans oublier le Congo de Sassou où le soutien des sociétés pétrolières françaises jouent un rôle prédominant dans la gestion des finances congolaises. Tous ces leaders ont bloqué l’essor d’une nouvelle Afrique centrale. D’où ma conviction d’un changement générationnel dans l’échiquier politique de la sous-région.

Ecrit par Konde Nzuka

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